1969

La naissance des organisations politiques autochtones

Plusieurs organisations politiques autochtones d’influence voient le jour dans le sillage des événements économiques et politiques de l’année 1969. En effet, de plus en plus de sociétés originaires du Sud s’aventurent dans le Nord afin d’explorer et d’exploiter les ressources en minerai, en pétrole et en gaz disponibles entre la vallée du Mackenzie, la mer de Beaufort et les îles de l’Arctique, entravant ainsi la pratique traditionnelle de la chasse par les peuples autochtones. Parallèlement, le gouvernement canadien suscite la polémique en publiant son « Livre blanc », dans lequel il propose d’abolir la Loi sur les Indiens, de supprimer le ministère des Affaires indiennes et du Développement du Nord et de mettre fin aux protections juridiques spécialement accordées aux Autochtones. Or, ce Livre blanc ayant été rédigé sans la participation des groupes autochtones, ceux-ci s’indignent et s’organisent afin de défendre leurs terres ancestrales, et une nouvelle génération de jeunes chefs avisés s’impose partout au Canada.

Les groupes politiques ainsi créés reprennent les structures politiques autochtones traditionnelles, bien antérieures à la traite des fourrures. De nouvelles organisations aux visées aussi bien politiques que culturelles et spirituelles se forment, représentant Dénés, Métis et Inuvialuits des Territoires du Nord-Ouest. En octobre 1969, des membres de la communauté dénée assistent aux premières rencontres organisées par la section ténoise de la Fraternité des Indiens. Pierre Catholique, chef de Łutselk’e, déclare : « Plus jamais un chef ne prendra place devant plusieurs membres du gouvernement. Désormais, si 21 représentants gouvernementaux sont présents, 21 Indiens devront l’être également. » Les Inuits et les Métis voient très vite l’intérêt de faire entendre leurs voix. En 1970, le Comité d’étude des droits des Autochtones (CEDA) réunit les personnes qui souhaitent parler au nom de tous les peuples autochtones des TNO. Agnes Semmler devient une figure de proue du mouvement en faveur de la reconnaissance des droits autochtones.

La Fraternité des Indiens et le CEDA attirent l’attention du gouvernement territorial et fédéral sur plusieurs problèmes : « Nous étions organisés comme un groupe d’activistes réunissant des Autochtones de l’Arctique de l’Est, de l’Arctique central et de la rive sud du Mackenzie. C’était quelque chose d’inhabituel et de déroutant, à l’époque, pour le tout jeune GTNO », se souvient Nellie Cournoyea, ancienne cheffe active au sein du CEDA. Elle évoque également la remise en cause, par les membres du CEDA, de l’établissement par le GTNO d’une administration gouvernementale dans les hameaux, les villages et les villes, car cette nouvelle structure de gouvernance imposée vient modifier les relations entre les collectivités et leurs habitants.

La Fraternité des Indiens des TNO, le CEDA et la Nation des Métis (constituée en organisation en 1972) font activement part de leurs inquiétudes en ce qui concerne la violation des traités, les problèmes relatifs à l’utilisation des terres et les atteintes aux droits humains. Même si ces groupes travaillent généralement de façon indépendante, ils s’inscrivent tous dans un mouvement d’ampleur croissante, qui vise à faire avancer la cause des droits des peuples autochtones, aux TNO comme dans tout le Canada.