1948

Route Mackenzie

En novembre 1945, les gouvernements de l’Alberta et du Canada signent un accord pour la construction d’une route praticable en tout temps qui suivrait l’ancienne piste de convoi de traîneaux direction nord, de Grimshaw à la rive sud du Grand lac des Esclaves, à Hay River. Cette route est dans l’intérêt des deux parties, qui souhaitent améliorer le système de transport, tributaire du fret aérien coûteux, des routes de glace saisonnières ou de barges précaires et limitées pour acheminer biens et personnes aux Territoires du Nord-Ouest.

De nombreuses difficultés retardent l’achèvement de la route de gravier, initialement prévue pour l’automne 1947, jusqu’au début de l’hiver 1948, mais plusieurs commencent à l’emprunter avant même qu’elle ne soit terminée. Le 20 août 1948, les premiers touristes à s’aventurer sur la route arrivent à Hay River en automobile, après avoir enduré un trajet de 19 heures depuis Edmonton avec peu de services.

Le surlendemain marque l’avènement du trafic commercial, lorsque la W.R. Menzies Fishing Company de Faust, en Alberta, achemine trois bateaux de pêche de 35 pieds à Hay River en empruntant la nouvelle route, et les met à l’eau dans le Grand lac des Esclaves. Pour de nombreuses personnes, l’intérêt de la route réside dans le fait qu’elle permet de transporter des marchandises à destination et en provenance des Territoires du Nord-Ouest, tout en évitant l’ancienne voie navigable passant par Fort Smith.

La partie de la route située en Alberta, juste au sud de la frontière avec les TNO, connaît d’importants problèmes. Au printemps 1949, cette section de la route est surnommée « le trou ». Le tronçon de 40 kilomètres entre la rivière Steen et la frontière entre les TNO et l’Alberta est achevé à la hâte à l’automne 1948. Les ingénieurs sous-estiment les conditions, ce qui entraîne une détérioration rapide de la route, ainsi que des fermetures. Manquant cruellement de gravier, de fonds et de reconstruction, la route tant vantée n’est rien de plus qu’un chemin de terre cisaillé d’ornières. Les camionneurs appellent les TNO « la terre promise » : en effet, les efforts nécessaires pour y arriver sont dignes d’un véritable chemin de croix.

À la fin de juillet 1949, la route Mackenzie est en si mauvais état que la pêche commerciale ferme sur le Grand lac des Esclaves, les pêcheurs ne pouvant pas envoyer leurs prises vers le sud par camion. La route n’est pas en état de transporter des dignitaires venant du sud, et le projet d’ouverture officielle est discrètement balayé sous le tapis. Enfin, les gouvernements canadien et territorial effectuent les réparations, reconnaissant que la route est essentielle à la création d’une région indépendante sur le plan économique, et à l’autonomie de déplacement des personnes.

L’expansion de la route ouvre le Nord aux intérêts du Sud, sans consultation aucune des Autochtones signataires du Traité 8 ou du Traité 11 dont la route traverse les terres. En effet, la construction de routes dans le Nord accélère les changements sociaux et économiques, modifiant la vie des Autochtones aux TNO. La résistance à la construction de la route s’intensifie au cours des 25 années suivant la création du premier tronçon de la route Mackenzie.