1963

Réserve de bisons du Mackenzie

Allant de la quasi-extinction au rétablissement, l’histoire du bison des bois est peut-être le triomphe en matière de conservation le plus spectaculaire du Canada. Du début au milieu du 19e siècle, le bison des bois du Nord est considéré comme abondant, sa population maximale étant estimée en 1850 à 160 000 à 170 000 têtes. Or, en 1950, soit 100 ans plus tard, on pensait tout d’abord que le bison des bois a disparu.

L’introduction des armes à feu et le déplacement des trappeurs vers le nord dans les années 1900 déciment les bisons des bois, leur nombre chutant à environ 200 à 500 animaux. Dans les années 1870, le gouvernement canadien adopte la Loi sur la protection du bison, rendant illégal l’abattage des bisons, mais cette mesure ne parvient pas à enrayer leur déclin, la loi n’étant pas suffisamment appliquée.

Pour aider à stabiliser la population de bisons des bois, la Police montée du Nord-Ouest, qui a établi un poste à Fort Fitzgerald en 1907, commence à arrêter les individus chassant le bison. Le Traité 8 avait promis un accès continu et immuable aux secteurs de chasse, et l’application restrictive de ce règlement constitue une violation directe de l’accord du Traité. Les Dénés doivent se battre pour faire entendre leurs préoccupations et les débats liés au bison se prolongent jusqu’aux négociations du Traité 11. La mise en place d’un système de réserves de gibier réservées aux Autochtones ne parvient pas à stabiliser les sources de nourriture perdues à cause de la chasse excessive.

Entre-temps, le gouvernement fédéral achète un troupeau de 709 bisons des plaines à un éleveur du Montana et les déplace vers le Nord dans une réserve près de Wainwright, en Alberta. Une fois le troupeau de Wainwright considérablement agrandi, le gouvernement décide de relocaliser plus de 6 000 bisons des plaines excédentaires plus au Nord, dans le parc national Wood Buffalo nouvellement créé près de Fort Smith. On croit que le parc est suffisamment grand pour que les bisons des plaines introduits n’entrent pas en contact avec la population indigène et beaucoup plus petite de bisons des bois. Les Dénés locaux ne sont pour ainsi dire pas consultés quant à d’autres mesures possibles.

Au lieu de cela, la population du bison des plaines écrase celle du bison des bois et, à cause des croisements, on considère la sous-espèce pure du bison des bois éteinte dans les années 1950. On croit qu’il ne reste plus de bisons des bois de race pure, et les animaux nés de croisements entre les bisons des bois et les bisons des plaines du parc sont victimes de maladies du bétail introduites par les bisons acheminés depuis Wainwright.

En 1957, un événement tout à fait inespéré se produit : un avion patrouillant dans le coin nord-est du parc repère un troupeau isolé de bisons le long de la rivière Nyarling. Ces 200 animaux semblent être des bisons des bois de race pure, et les tests montrent qu’ils sont exempts des maladies gangrénant le troupeau principal du parc Wood Buffalo, prouvant qu’il n’y a probablement pas eu de contact entre les deux populations.

En 1963, lors d’une rafle spectaculaire au milieu de l’hiver, 18 de ces bisons des bois purs sont capturés et transportés par camion sur la rive nord du fleuve Mackenzie, puis relâchés dans la nature près de Fort Providence. En 1989, leur nombre passe à 2 400 et se stabilise à 1 900 animaux en 1998. Ces bisons sont souvent observés sur les routes de la région du Grand lac des Esclaves.